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Certificats de travail… bienvenue dans un monde subliminal

Écrit par Olivier Menouar
Paru le 11 novembre 2014

loupe rhEn Suisse, le certificat de travail est le sésame indispensable pour rebondir tout au long de sa carrière professionnelle. Il permet aux recruteurs de se faire une idée assez précise du candidat à l’embauche. Il s’agit en somme d’un passage de témoins d’employeur à employeur qui atteste de la fiabilité du salarié mais qui peut aussi, dans certains cas, contenir quelques réserves afin d’épargner au futur "repreneur" quelques fâcheuses déconvenues.

Les niveaux de lecture du certificat

Il est évident que lors de ses entretiens, le candidat se présente toujours à son avantage, en mettant l’accent sur ses qualités, ses compétences, son expertise et les points forts de son parcours. Son dernier employeur, quant à lui, se doit d’être le plus objectif possible dans la rédaction du portrait de son "futur-ex employé", tout ceci dans le cadre strict de la loi. Cependant, n’oublions pas que d’un côté comme de l’autre, nous avons affaire à des êtres humains, faits de chair, de sang et de sentiments.

A ce stade, quatre niveaux de lecture du certificat s’offrent à nous :

1) L’auteur du document écrit ce qu’il veut réellement exprimer (message non codé) :

  • Option 1. Exemple : "il/elle aimait le travail bien fait et avait le sens du détail" (pas de sous-entendu ou message caché).

2) L’auteur du document choisit un terme ou une formulation pour exprimer une nuance, un sous-entendu ou une appréciation moins positive qu’elle n’y paraît (message codé) :

  • Option 2. Avec le même exemple, "il/elle aimait le travail bien fait et avait le sens du détail" = Il/elle perdait du temps avec des détails inutiles.

3) L’auteur et le récepteur utilisent le même langage : soit non codé, soit codé.

4) L’auteur et le récepteur utilisent des langages différents, l’un codé l’autre non. Conséquence : incompréhension entre les deux partis.

Nous voilà alors plongé dans les "eaux troubles et mystérieuses" du langage à double sens et de ses possibles interprétations…

Heureusement, la loi est là pour encadrer les rapports des trois parties concernées (ex et futur employeur et employé), afin de prévenir, empêcher et le cas échéant sanctionner les abus dans ce domaine.

L’article 330a du code des obligations précise ainsi que le certificat doit contenir tous les faits importants pour l’appréciation globale d’un salarié, tout en restant intéressant pour un tiers. Des événements uniques ou des circonstances non caractéristiques pour le salarié, son comportement et ses performances n’ont pas à figurer dans un certificat.

Comment lire entre les lignes du certificat

En revanche, l’auteur du certificat est tenu de ne pas dissimuler à son alter ego les éventuelles fautes graves que le salarié aurait pu commettre dans l’exercice de ses fonctions. Dans le cas contraire, le futur employeur est en droit de lui demander réparation. Mais outre ce cas de figure, le document ne peut en aucun cas contenir des appréciations négatives, péjoratives ou ambigües sur le candidat, même camouflées sous des formules codées. Profitant d’un certain flou juridique, l’utilisation de ces formules semble pourtant être devenue monnaie courante. Ce phénomène peut donc parfois susciter la méfiance, voire la "paranoïa" de certains salariés en fin de contrat.

Cependant, à l’analyse de la plupart des formulations couramment utilisées, nous nous apercevons qu’il s’agit davantage de nuances et d’indications sur la satisfaction qu’a eue l’entreprise du salarié, plutôt qu’un outil susceptible de servir à régler des comptes de manière déguisée. En principe, rappelons tout de même que l’employeur doit donner des informations complètes, correspondant à la réalité, et se montrer bienveillant à l’égard de son collaborateur. C’est pourquoi il est important pour ce dernier d’être bien informé des éléments de langage et de ses droits, s’il estime que son certificat quitte sa vocation première pour devenir une véritable entrave à son avenir professionnel.

Certificat de travail en Suisse : ce qu'il faut savoir absolument ! 

  • Surveillez les vœux qui clôturent le certificat

A la fin du certificat de travail, l’entreprise formule des vœux de réussite pour la suite professionnelle de l’intéressé. L’intensité de ces vœux donne en général une indication importante sur la satisfaction de votre employeur concernant la collaboration.

ATTENTION !!! Bien que situés à la fin du document, les vœux sont l’une des premières choses qu’un recruteur regarde. Il peut s’agir d’une recommandation plus ou moins appuyée, ou dans le pire des cas d’un avertissement concernant le profil du postulant. Par exemple, "nous lui souhaitons beaucoup de succès pour son avenir", signifie " le succès qu'il n'a encore jamais connu (cf page 4 du document EPFL : « Tableau Formule Finale »).

  • L’entreprise est obligée de vous fournir un certificat

Même si les relations de travail se sont mal terminées, l’ancien employeur a l’obligation de fournir un certificat de travail, dès la fin du contrat. Dans le cas contraire, l’employé doit saisir les prud’hommes afin de faire valoir ses droits.

Conseil : L’employeur étant tenu par la loi de fournir un certificat, le collaborateur peut le demander à tout moment. Il est conseillé de le faire à chaque changement de poste ou de supérieur, même au sein de la même entreprise, surtout si les rapports avec l’employeur sont bons.

  • 10 ans pour réclamer un certificat

Il est très rare qu’une entreprise ne délivre pas de certificat, principalement parce que c’est interdit par la loi. En général délivré à la rupture du contrat de travail, le précieux document peut parfois se faire attendre. Il est alors vivement conseillé de se rappeler au bon souvenir de son ex-employeur pour l’obtenir. Ne pas avoir de certificat est un point résolument négatif dans une recherche d’emploi en Suisse.

L’employé a 10 ans pour réclamer un certificat manquant.

  • Il est possible de faire rectifier son certificat

Si le certificat semble incomplet ou ne pas refléter la réalité ou si encore des termes négatifs sont utilisés, l’employé a la possibilité de demander une rectification. Cette éventualité est d’ailleurs prévue et permise par le code des obligations suisse. Le demandeur devra alors apporter des preuves tangibles pour justifier ces modifications et en discuter avec l’employeur. Si le désaccord persiste, les deux parties peuvent faire appel à L’Instance de Conciliation afin de faciliter le dialogue. S’il n’y a toujours pas d’entente, il appartiendra aux prud’hommes de statuer sur le litige. Mais dans la grande majorité des cas, un compromis finit par être trouvé.

Sources :

  • Loi fédérale complétant le Code civil suisse (Livre cinquième : Droit des obligations)
  • EPF : « Formules usuelles employées dans les certificats de travail »
  • Initiative parlementaire de M. Eymann Christoph du 21/06/2000 : « Modification de l’article 330a CO (certificat de travail)
  • Braun Doris : « Les certificats de travail sont parfois encombrants… »
  • Manpower : « Le certificat de travail : les points essentiels »
  • Etudiants.ch : « Le Certificat de travail »
  • David Talerman-blog : « Certificat de travail en Suisse : 10 choses à savoir absolument »

Photo credit : Photos Libres

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5 comments on “Certificats de travail… bienvenue dans un monde subliminal”

  1. Excellent article! Au chômage l'année dernière, ayant depuis retrouvé un emploi, je suis tout à fait d'accord avec ce qui est écrit par Monsieur Menouar. Si le CV a son importance capitale évidente, les certificats font quasi toujours partie du "package" de base à envoyer, constituant le dossier complet demandé par tous recruteurs. Merci pour toutes ces précisions importantes et surtout bien utiles!

  2. Un article très clair et précis qui relève toute l'importance du certificat de travail en suisse, tant sur son contenu, ses subtilités que sur les différentes lectures que l'on peut en avoir.

  3. j'ai beaucoup apprécié cet article , mon fils réside en SUISSE et vient de se faire licencier.....je vais donc lui transmettre le lien sachant que ces informations vont très certainement lui être utiles.....beaucoup de finesse dans la formulation de cet article , merci......

  4. Merci pour cet article intéressant et fort utile ! Il est indispensable de se pencher sur les certificats délivrés par nos employeurs et même judicieux de demander les modifications nécessaire si certaines formulations semblent être inadéquates ou péjoratives.

  5. Merci pour cet article constructif mais ludique. Il ne faut pas hésiter à demander conseils autour de soi afin d’obtenir les conseils adéquats pour améliorer ses certificats, s'il est encore possible de le faire.

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