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C’est l’histoire d’un mec qui nous a quittés il y a déjà 30 ans

Écrit par Patricia Beranek
Paru le 24 juin 2016

Le 19 juin 2016, cela a fait déjà 30 ans que Michel Colucci, alias Coluche est décédé tragiquement dans un accident de la route. Mais pas question ici d’écrire quelque chose de triste sur la disparition de ce personnage attachant et singulièrement provocateur, mais plutôt de rendre un hommage à ce trublion télévisuel incontrôlable au grand cœur, fondateur des « Restos du Cœur », et qui était, sous ses airs de « clown en costume d’ouvrier », un véritable marketeur, en avance sur son temps. Décryptage.

Des personnages uniques qui touchaient tout le monde

colucheColuche s’est montré plus que novateur. Tout d’abord, lors de sa première apparition à la télé le 20 avril 1974, il est apparu en t-shirt et salopette (reçue d’Emmaüs, pour l’anecdote) alors que jusque-là les comiques français s’étaient toujours habillés en costume et cravate. Au travers de son personnage timide au look pataud, il a su se rendre si familier qu’il est devenu populaire dans tous les milieux et toutes les classes sociales (en jargon marketing, on dirait qu’il s’est approprié plusieurs parts de marché, et ce en s’adressant à plusieurs segments distinctifs).

Comme Coluche l’expliquait durant une interview, son inspiration, il la trouvait à travers de nombreuses informations et « chutes » (ndlr. des petites choses qui se passent) qu’il collectait durant l’année. Il s’en servait ensuite pour faire passer des messages sur lesquels il avait déjà une idée en amont et les communiquait dans des sketches surprenant de simplicité, et qui pourtant sonnaient justes. On pourrait dire qu’intuitivement il connaissait le principe KISS « Keep it simple and stupid ». Eh oui ! Du marketing pur, on vous dit.

Tous ses personnages, aussi comiques soient-ils, ont quelque chose de tragique, comme « l’autostoppeur », ce pauvre type dépourvu de sens civique qui demande « Où est l’allume-cigare ? Ah, y’en a pas. Mais ils l’avaient en option. Ah, bon, donc ils prennent l’allume-cigare et construisent la bagnole autour … », ou «le clochard analphabète », personnage fataliste qui regarde la vie en face, sans être ébloui par sa réalité parfois douloureuse et qui raconte « Ma femme m’a toujours dit que j’étais la troisième roue du carrosse … d’ailleurs, elle est partie avec la quatrième », ou encore son personnage punk dans le sketch « Le blouson noir» qui « balance » ses vérités comme il balancerait des injures, notamment quand il déclare : « Dieu a dit : il y aura des hommes grands, il y aura des hommes petits, il  aura des hommes beaux, il y aura des hommes moches ; vous serez tous égaux mais ça ne sera pas facile ».

Roi de l’impro, du stand-up et du buzz 

Roi de l’improvisation à la télévision ce qui est devenu monnaie courante aujourd’hui, il avait détonné en 1983 en arrivant sur le plateau de l’émission de Michel Drucker, enregistrée en direct, pour faire la promotion de son film « Banzaï », affublé d’un tutu de danseuse. Drucker, qui visiblement ne s’attendait pas du tout à le voir dans cette tenue, n’arrivait plus à se reprendre, tant il riait. Coluche fut le pionnier de ce type d’apparition fracassante.
Sa pensée élaborée était véhiculée sur un ton « mal-articulé » au format « pilier de comptoir » dans un « esprit bistrot », en d’autres termes, ses stand-up relataient un fond très travaillé dont la forme était rendue très accessible à travers des personnages dans lesquels les gens se reconnaissaient… Et c’est là sans doute une des plus grandes réussites de Coluche : avoir touché un public extrêmement large.

Des planches au cinéma

Very big red-yellow clown shoes on white

En 1980, Coluche décide d’arrêter la scène pour faire du cinéma. Il fera plus de dix films et sera d’ailleurs récompensé par un César pour son inoubliable interprétation dans « Tchao Pantin », où le public a découvert un Coluche triste et sombre, mais dont le jeu d’acteur témoigne de son immense talent. Durant sa période cinématographique, il a déclaré : « Faire du cinéma c’est mieux que de faire des spectacles, on bosse trois mois dans l’année et les neuf mois restants on a congé. C’est quand même le but : gagner du fric et en faire le moins possible. » La provocation, un autre moyen de faire du buzz, et Coluche l’avait bien compris.

Malgré sa courte carrière, il aura marqué son époque et le show-biz, et on ne l’oubliera certainement jamais. Merci, Coluche, de nous faire rire, encore et toujours.

Source : http://www.rts.ch/play/tv/doc/video/coluche-le-bouffon-devenu-roi?id=7776500

Photo credit : Szasz-Fabian Erika via Fotolia

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