Toutes les entreprises ont un code vestimentaire et celles qui prétendent ne pas en avoir besoin l'applique de façon implicite.
L’hygiène globale, le maquillage, les accessoires, la couleur du vernis à ongle ou celle des cheveux, tous les éléments qui composent notre apparence font partie du code vestimentaire.
Un opérateur de call center peut-il travailler en tenue décontractée ? Un cadre peut-il refuser de porter un costume ou une cravate ?
Dans quel contexte un employeur est en droit d'imposer ou d'interdire une tenue vestimentaire ?
Dans cette série d’articles, nous passons au crible les normes et les codes vestimentaires pratiqués en milieu professionnel.
Dans un premier temps, nous abordons différents points de vue, celui de l'employé et celui de l’employeur, pour ensuite détailler les tenues vestimentaires adaptées aux différents secteurs d’activité, avec quelques conseils à travers des exemples concrets en milieu professionnel.
Le code vestimentaire du point de vue de l’employé
Dans la sphère privée, en principe, chacun est libre d’exprimer son style. Dans le milieu professionnel, c’est une tout autre histoire. S'il existe, le code vestimentaire en vigueur dans une entreprise peut être spécifié dans le règlement intérieur, la convention collective ou le contrat de travail ; zoom sur les directives sur lesquelles se fonde un code vestimentaire en entreprise.
La sécurité au travail
L’employeur est lié par l'obligation de protéger et de respecter la sécurité de ses employés sur leur lieu de travail. Les employés qui sont amenés à soulever des charges lourdes ou qui manipulent des engins comme dans la construction et la logistique doivent être munis de vêtements et d’équipements de protection adéquats qui garantissent leur sécurité. Il en va notamment ainsi pour les employés qui sont exposés à des produits chimiques. Il sera donc interdit à un polisseur de travailler en débardeur ou à un magasinier de travailler en short.
L’employeur qui exige le port de vêtement de travail, comme par exemple un pantalon de travail, un tablier de cuisine ou une tunique médicale est tenu d'en rembourser les frais de nettoyage, d’entretien, de réparation et de remplacement (Art. 327-327a CO). Le remboursement est la norme lorsqu’il est impossible d’effectuer son travail avec ses vêtements usuels. A noter que cette règle n’est pas impérative et peut être modifiée par un simple accord.
Intérêts et image de l’entreprise
La liberté d’expression est un droit constitutionnel qui, en milieu professionnel, est limité par le devoir de fidélité du collaborateur à défendre les intérêts de l’entreprise. L’employeur peut, soit pour des motifs de sécurité, soit dans le cadre d’une stratégie commerciale ou encore pour promouvoir l’image de marque de l'entreprise, limiter la liberté d’expression de ses collaborateurs en interdisant par exemple piercings et tatouages.
En d’autres termes, le collaborateur est libre du choix de ses vêtements et l’employeur doit le respecter dans la mesure du possible. Cependant, si le droit à la personnalité entre en conflit avec les intérêts légitimes de l’employeur, ce dernier peut alors donner des directives vestimentaires que l’employé se doit de respecter, sous peine d’une sanction disciplinaire (avertissement, mise à pied) pouvant aller jusqu’au licenciement pour faute grave.
Contact avec la clientèle
L'employé qui représente la société à l’égard de tiers est soumis aux intérêts de l’employeur, quant à l’image qu’il entend donner de sa société.
Les intérêts de l’employeur prédominent sur ceux des collaborateurs, si et seulement si, ces derniers sont en contact directe avec la clientèle, les partenaires commerciaux ou les fournisseurs. Le droit de l'employeur d’imposer des tenues vestimentaires sera d’autant plus étendu en fonction du standing de l’entreprise et des usages de la branche. Bien que les directives vestimentaires n'aient pas de lien avec l’exécution de son travail, sa fonction au sein de l’entreprise peut amener l’employé à croiser ou à recevoir du personnel. L’employeur peut alors lui imposer une tenue. Par exemple, un collaborateur cadre au sein d’une entreprise représente la crédibilité de celle-ci, il n’est donc pas en droit de travailler en jeans et en baskets.
En cas d’absence de contact visuel avec des tiers extérieurs, l'employé ne dispose pas d’une liberté totale. Cependant, il pourra se permettre de porter une tenue plus décontractée.
Limite au droit de l’employeur
Certains employeurs sont très stricts et entravent parfois les limites de la protection de la personnalité (Art.328 CO) de leur employé en imposant des directives aux détails trop intimes, tels qu’un parfum précis, une coupe de cheveux, la couleur des sous-vêtements pour les femmes ou celle des chaussettes pour les hommes. Il y a quelques années, un manuel de 44 pages édité par une célèbre banque suisse pour apprendre à ses salariés à afficher une « apparence impeccable » a fait couler beaucoup d’encre dans la presse internationale. L’employeur ne peut pas donner d’instructions chicanières ou portant atteinte à la personnalité de son personnel.
Les directives vestimentaires destinées au personnel sans fonction de représentation ou sans contact avec la clientèle peuvent être considérées comme abusives, si celles-ci ne sont pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnées au but recherché. De même, imposer un déguisement n’est pas possible sans l’accord de chaque employé, sauf si ce dernier a été expressément engagé pour produire une prestation artistique ou pour des tâches d’animation.
Pour finir, l’employeur doit respecter l’égalité entre femme et homme et ne peut donc pas imposer des règles de tenues vestimentaires à l’un des deux sexes, si aucune règle similaire ne s’applique au sexe opposé.
Lectures complémentaires :
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Sources :
- Alexandra Marion, Tenue vestimentaire au travail : 4 points essentiels à retenir, 13 avril 2021, sur juritravail.com
- Andrée-Anne Blais-Auclair, Code vestimentaire au travail : les vraies questions à se poser, 23 novembre 2020, sur agendrix.com
- Marianne Favre Moreillon, Droit du travail II, 2016, sur weka.ch
- Jean Christophe Schwaab, Codes et directives vestimentaires : Quel(s) habit(s) l’employeur peut-il prescrire ou proscrire?, 10 décembre 2010, sur schwaab.ch
- Article 327 du Code des obligations
- Article 328 du Code des obligations
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Le code vestimentaire au travail est, il est vrai, parfois simple mais souvent compliqué. En effet, il est important d’être à l’aise dans ses vêtements, mais sans oublier que nous sommes l’image de l’entreprise et parfois le choix de la tenue appropriée peut être cornélien. Merci pour cette première partie très complète. J’ai hâte de lire la suite.