Entretien avec Veronique Kampfen, directrice de la communication de la Fédération des Entreprises Romandes Genève (FER Genève)
Peu à peu, le travail à distance ou télétravail, le bien-être au travail, le Work-Life-Balance, l’holacratie, deviennent les nouveaux paradigmes du travail.
La sociologie du travail s’oriente donc vers la façon de vivre le travail et non plus de le subir.
Le travail par objectif succède au travail par processus. La performance est préférée à la compétence et la flexibilité à la rigidité !
En Suisse, des entreprises publiques et privées mettent en place des initiatives comme le ‘’WORKSMART’’ pour promouvoir ces nouvelles formes de travail. Ainsi, de plus en plus d’entreprises comme les Services industriels de Genève, auxquels nous avons consacré un article , innovent dans leur culture du travail.
Pour en savoir plus sur le sujet, nous sommes allés à la rencontre de Véronique Kämpfen, directrice de la communication de la FER Genève.
Les nouvelles technologies au service du travail
Véronique Kämpfen envisage l’évolution du travail comme la capacité d’un secteur d’activité à pouvoir rester agile ou flexible :
« Tout dépend du secteur d’activité. Dans ceux qui font appel à des compétences plus intellectuelles que physiques, nous avons l’opportunité de flexibiliser le travail. Dès lors, nous avons la chance de travailler à la maison comme au bureau. Ainsi, la conciliation entre vie privée et vie professionnelle est rendue plus facile grâce aux nouvelles technologies ».
Suite à la mise en place du numérique, les collaborateurs ne veulent plus subir le travail, mais vivre le travail. « Aujourd’hui, le travail dépend des personnalités et des types d’activités ».
Travailler en adéquation avec sa personnalité
La liberté donnée par les modes alternatifs de travail remet le bien-être de l’individu au cœur du travail. Chacun à son niveau peut mettre en phase sa personnalité et le travail.
« Tout dépend de la personnalité. Si nous prenons le cas des horaires flexibles, certains apprécient de pouvoir disposer comme ils l’entendent de leurs horaires et d’autres se sentent plus à l’aise dans un cadre bien défini dans lequel ils doivent effectuer leurs heures de travail. Pour ces derniers, l’horaire de travail fixe répond à un besoin de reconnaissance des heures supplémentaires et d’honnêteté envers l’employeur » clarifie Véronique Kämpfen.
La confiance érigée comme nouveau contrat social dans l’entreprise moderne
L’entreprise moderne est organisée autour de l’idée d’une aventure collective où chacun à son niveau apporte quelque chose de déterminant à l’organisation.
Chaque collaborateur doit pouvoir exprimer de manière efficiente son potentiel. Pour plus de créativité, il faut rendre de l’autonomie et de la confiance aux personnes.
« Celui qui se trouve dans un système totalement flexible va travailler selon un contrat de confiance avec l’employeur. Il s’agit d’un management par objectif ! C’est-à-dire que l’employeur confie à l’employé une mission à réaliser. A charge de l’employé de s’organiser comme il l’entend pour réaliser cette mission » explique Véronique Kämpfen.
Les managers doivent dorénavant se focaliser principalement sur l’objectif assigné au collaborateur sans tenir compte de la façon dont il s’organise pour réaliser sa mission. C’est la définition de la confiance au travail.
A partir du moment où l’on donne de la confiance aux collaborateurs, ils nous la rendent. Pourquoi ? Parce qu’ils sont plus motivés et trouvent plus de sens à leur travail : « L’avantage pour les employeurs d’offrir des formes de travail à la carte, c’est d’avoir des collaborateurs plus motivés ».
Les formes flexibles et mobiles de travail, cela ressemble à quoi ?
Véronique Kämpfen expose les pratiques en Romandie :
- Le télétravail est une forme relativement répandue. Le droit du travail impose sa formalisation. En effet, l’employeur doit mettre à la disposition de l’employé un environnement de travail professionnel depuis la maison. Attention toutefois aux zones frontalières. Par exemple, une entreprise installée à Genève qui ferait travailler une personne habitant de l’autre côté de la frontière à plus 25% depuis son domicile, devra payer les assurances sociales en France.
- Le job sharing consiste à partager les responsabilités d’un poste à plein temps entre plusieurs employés. Ils partagent non seulement les tâches du poste, mais aussi l’espace de travail.
- Enfin, le desk sharing permet non seulement d’économiser des mètres carrés, mais aussi de bonifier les interactions entre les collaborateurs.
Une forme d’économie pour l’entreprise !
« Les entreprises réfléchissent à optimiser leurs coûts. Pour les chefs d’entreprise, les coûts liés aux locaux sont élevés. Par conséquent, la question de l’optimisation de l’espace de travail est déterminante dans la minimisation des coûts. Offrir des modèles de travail variés est donc une manière indirecte de réduire les coûts » assure Véronique Kämpfen.
Sans renier sa culture et remettre tout en question, toute entreprise peut mettre en place une organisation de travail fondée sur la confiance, respectueuse de la liberté des collaborateurs et de la conciliation entre vie privée et vie professionnelle. Toute la marque employeur en bénéficie et la société y gagne.
Il ne s’agit pas de faire croire que les modèles alternatifs de travail sont la solution à tous les maux des entreprises qui souhaitent innover.
Véronique Kämpfen nous rend attentif aux écueils possibles de cette mutation : « La limite du système est qu’il faut faire attention à ne pas éloigner les collaborateurs de l’entreprise. En effet, il faut construire un système gagnant pour tout le monde, de telle sorte que d’une part, le lien entre les collaborateurs soit renforcé et que de l’autre, le lien entre les collaborateurs et l’entreprise ne soit pas distendu ».
Cela dit, il faut garder à l’esprit que « pour pouvoir être pérenne, il faut se renouveler » selon Véronique Kämpfen.