Emmanuel Eggermont dans Strange Fruit ©Jihyé Jung
Ce mois, l’Association pour la Danse Contemporaine (ADC) accueille deux spectacles du chorégraphe et interprète Emmanuel Eggermont, dont un en première mondiale, Aberration, suivi par Strange Fruit.
Aberration
Ce soir-là, la salle de l’ADC est plongée dans une atmosphère éclatante et nette. Le décor est blanc, graphique et lumineux. La scénographie se met doucement en mouvement. L’œil est tout à coup attiré par ces lignes qui se dessinent sur le sol dans une multitude de nuances de blancs.
Emmanuel Eggermont habillé de blanc s’avance silencieusement, presque religieusement sur la scène. Ses mouvements précis nous transportent dans un univers immaculé, habité de personnages énigmatiques. La musique du compositeur, Julien Lerpreux, apporte encore plus d’espace et nous emmène à la découverte de ce troublant univers blanc.
Tout devient texture, musique, couleur, lumière. Un mélange d’émotions envahit le spectateur qui est pris dans un tourbillon sensoriel. Emmanuel Eggermont nous emporte dans une danse bouleversante, « comme si nous retrouvions la vue ».
Emmanuel Eggermont dans Aberration ©Jihyé Jung
Strange Fruit
Plaques de plâtre et sagex au sol, vue à 360°, Emmanuel Eggermont entre dans un silence étouffant vêtu d’une chemise et d’un pantalon bleu foncé. Il se déplace sur cette étrange scène amovible. Amplifié par un micro, le bruit de ses pas produit par le craquement de ces plaques, créé ainsi une atmosphère oppressante. Par la suite, le grésillement d’un diamant sur un vinyle se fait entendre, accentuant cette ambiance.
Puis, soudainement résonne la voix de velours de Billie Holiday sur le poème d’Abel Meeropol Strange Fruit, ayant pour thème les violences raciales vécues aux USA dans les années 30. Sur ce sujet lourd et d’actualité, la voix et le corps s’entremêlent pour ne faire plus qu’un. La symbiose entre les deux délivre des émotions puissantes à travers la salle.
Durant 50 minutes, nous voyageons dans le temps sur différentes versions musicales de ce poème subtilement chorégraphié et interprété par Emmanuel Eggermont. Sa danse, d’une grande rigueur technique et esthétique, s’inspire d’univers et de documents faisant ainsi monter en puissance la dénonciation de la violence sans jamais la citer.
Par ces deux créations, Emmanuel Eggermont nous a fait voyager au travers de la matière et des sens comme personne.
Sources :
http://www.lanthracite.com/equipe
https://adc-geneve.ch/spectacle/emmanuel-eggermont/
https://adc-geneve.ch/spectacle/emmanuel-eggermont-2/
https://www.francemusique.fr/actualite-musicale/pourquoi-aime-t-billie-holiday-1672
Credit photo : ©Jihyé Jung