Nous allons découvrir que le mot humain pour définir un service du personnel dans le monde du travail est arrivé tardivement dans l’histoire.
Salarium - L’époque romaine
Le mot salarium en latin désignait le salaire. Il était un mot dérivé de sal, le sel.
Le salarium était le paiement pour un travail ou un service rendu. Il désignait la ration de sel fournie aux soldats romains, puis il désignait l’argent versé afin d’acheter le sel et d’autres vivres.
Le travail au Haut Moyen-Âge et au Moyen-Âge
En 492, à la chute de l’Empire romain, pendant cinq siècles, l’instabilité règne, les invasions barbares détruisent les récoltes, de nombreuses personnes meurent et le commerce disparait. Ceci perdure jusqu’en 987, avec l’avènement de la dynastie capétienne.
Ces trois ordres composent cette société :
- Les labores sont ceux qui travaillent : les paysans, mais aussi les marchands et les artisans. Ils veillent à la subsistance des deux autres ordres
- Les bellatores sont les hommes d’armes composés de seigneurs et de chevaliers.
- Les oratores, qui se consacrent uniquement à la prière sont les hommes d’église.
Le travail en cette période est limité au travail agricole. Il est considéré comme la conséquence du péché originel et se définit en tant que travail-châtiment ou travail-pénitence. Le travail est alors perçu comme une malédiction qui se confirme par la pratique de l’esclavage, puis du servage. Les labores étaient donc des êtres asservis et inférieurs, et pour eux, le travail était une occasion de se racheter et de faire une pénitence.
Les corporations organisent le travail
A la fin du Xème siècle, un nouveau système politique émerge : le système féodal, et le pouvoir royal se morcèle. La monnaie commence à circuler dans toutes les couches de la société ce qui va développer le commerce. Les villes renaissent et surtout les métiers de l’artisanat se diversifient de plus en plus.
Un nouvel ordre apparaît : les marchands et les artisans (considérés auparavant comme des labores). Outils et vêtements sont fabriqués par ces personnes, qui vont acquérir un pouvoir politique et transformer la société. Ce sera aussi l’arrivée des bourgeois. Ils s’organisent en se regroupant, afin de réglementer leur activité et aussi de protéger leur intérêt.
La notion de travail change. Elle prend une dimension spirituelle. Le travail est une forme d’obéissance naturelle au créateur. Pour l’amour de Dieu, le paysan travaille la terre et les moines se doivent de recopier des manuscrits et de bêcher leurs champs.
Les métiers s’organisent. Dans la cité, les métiers spécialisés se regroupent en corporation et les modalités du travail changent. Chaque corporation s’administre elle-même, et exerce son monopole.
Le rôle de la corporation consiste à :
- Réglementer l’activité (conditions de travail, façon de fabriquer les produits…
- Se prêter assistance
- Contrôler la production
Une corporation possède :
- Un local de réunion (sa maison)
- Une caisse d’assistance commune
- Des règlements (qui sont surveillés par des jurés)
- Une chapelle
La corporation se distingue par :
- Une bannière
- Un sceau
- Un saint patron
Une corporation comprend :
- l’apprenti
- l’apprenti devient compagnon : il reçoit un salaire
- le maître : il est un compagnon ayant présenté un chef-d’œuvre, et qui a pu payer un droit d’admission très élevé pour devenir maître. Dans le cas contraire, il demeure compagnon. Il obtient ainsi le droit de posséder un atelier, des outils et d’acheter la matière première. Il peut alors former les apprentis et diriger la corporation.
Tous les travailleurs ne font pas partie de corporations, ils ne sont pas spécialisés. Certains métiers sont désignés comme « vils », tels que les meuniers, les aubergistes, les bateliers, les charretiers, etc.
Au plus bas de la société, on trouve des hommes qui acceptent n’importe quelles tâches. Ils n’ont pas de métiers. On les nomme « operarius » (ouvrier) ou « manoperarii » (manœuvre). Ils sont embauchés pour une journée ou plusieurs jours. La place de Grève à Paris était très connue pour l’embauche de ces gens.
A la campagne, on distingue deux sortes de paysans : les paysans non-libres, les serfs, appartenant au seigneur et les vilains, qui eux sont libres. Ils travaillent sur les terres du seigneur et louent leur terrain.
Dès le XIème siècle, les serfs sont affranchis et les seigneurs décident de les employer comme salariés.
Durant les années 1350 à 1450, c’est l’âge d’or pour les compagnons.
Leurs salaires augmentent et ils fondent leur propre confrérie, car la main d’œuvre diminue.
Mais, malheureusement pour eux, à la fin du XVème siècle, un système oligarchique s’installe. Les droits des compagnons et des apprentis sont limités, et pour un compagnon, il est de plus en plus difficile de devenir maître, tellement les droits d’entrée sont élevés. C’est le déclin des corporations. Elles deviennent des organismes très conservateurs, sclérosés et réticents au progrès techniques et limitant l’installation de nouvelles industries.
Elles seront supprimées et interdites, en 1791, à la révolution française.
La direction du personnel et le travail – Milieu du XIXème siècle
Avec le processus historique de la révolution industrielle, une société jusqu’à présent à dominante agraire et artisanale bascule vers une société commerciale et industrielle.
Cette transformation affecte profondément l'agriculture, l'économie, le droit, la politique, la société et l'environnement. En effet, dans les années 1860, les grandes compagnies européennes de chemin de fer se développent. On a besoin de recruter des personnes jeunes, en bonne condition physique et morale. Il faut également former ces personnes à de nouvelles professions (mécaniciens, aiguilleurs, etc.) non seulement pour conduire les trains, mais aussi pour la sécurité.
La sélection des meilleurs et la constitution d’un encadrement sur place, ainsi que les mutations, les congés et les promotions nécessitent des connaissances et une pratique que la direction du personnel acquiert petit à petit.
Les termes suivants apparaissent : contrat de travail - conventions collectives de travail - code du travail - association professionnelle - droit de grève - dialogue social - direction du personnel.
La direction des Ressources humaines – Seconde moitié du XXème siècle
Dans les années 1980, les fusions de sociétés et l’internationalisation des entreprises sont des défis pour la société. Ainsi, la direction du personnel devient la direction des ressources humaines. Elle s’informatise (SIRH) et surtout se professionnalise. Elle maîtrise de mieux en mieux les opérations administratives et légales, ce qui amène à traiter les problèmes humains d’une manière bureaucratique et rigide, alors que ces soucis mériteraient une attention individuelle avec de l’empathie et plus de souplesse.
La direction des ressources humaines a deux grands rôles :
- Gérer la partie administrative : le cycle de vie des collaborateurs en entreprise de leur entrée à leur sortie, comprenant le salaire, les assurances sociales, les contrats, le certificat de travail, etc.
- Gérer des ressources humaines : le recrutement, la formation, les évaluations, la gestion des conflits, etc.
La direction des Relations humaines – De nos jours
Depuis quelques années, on commence à utiliser le terme : directeur des relations humaines et non plus directeur des ressources humaines.
Le passage qui s’effectue du mot ressource au mot relation est le résultat d’une évolution dans la façon de considérer l’employé dans une entreprise. Les employés ne sont plus des ressources, des éléments économiques qu’on peut changer et qu’on sollicite de manière identique et dans lesquels on puise pour faire tourner la machine.
Même dans le recrutement, on recherche des talents et non plus des ressources, les qualités personnelles des candidats sont devenues un des principaux critères d’engagement.
Les entreprises sont incitées à trouver des solutions pour motiver leur personnel, team building et réunions quotidiennes tenues à tour de rôle. Chacun donne son avis sur le travail et la façon dont il est organisé.
L’employé devient alors un humain avec une personnalité complexe dont les multiples caractéristiques peuvent, si elles sont bien exploitées, être une valeur ajoutée considérable pour l’entreprise en faisant partie de son capital immatériel.
Le robot ? – le futur
Les machines commencent à remplacer l’humain, de plus en plus. Les caissières des grands magasins disparaissent au profit de machines, les guichetiers dans les gares sont remplacés par des automates à billets, le travail administratif est exécuté directement par les professeurs, grâce aux ordinateurs certains entretiens de recrutement se font par des robots, etc.
Bien évidemment, l’humain est souvent capable de faire plus qu’une machine. Il a beaucoup de valeurs ajoutées. Il peut se former et s’adapter, mais est-ce le cas de tous les humains ? Y aura-t-il encore du travail pour tout le monde ? Arriverons-nous encore à payer notre nourriture, notre loyer et/ou notre assurance maladie ?
Notre système fonctionne avec les cotisations aux assurances sociales, AVS (assurance vieillesse et survivants), AI (assurance invalidité) et AC (assurance chômage). Qui va les payer, s’il y a de moins en moins de salariés ? Devons-nous assujettir les robots et machines automatiques aux assurances sociales ?
Ces questions restent ouvertes.
Face au monde qui change, il vaut mieux penser le changement que changer le pansement
(Francis Blanche)
Sources :
Les « ressources humaines », une appellation à revoir ? Catherine Boyer
Petite histoire des ressources humaines Marc Mousli
Les salariés du Moyen-Age Laurent Feller
Le travail au Moyen-Âge : de quelle manière le Moyen-Âge a pensé et pratiqué le travail
Lectures complémentaires :
Vers les relations humaines Raphaël Bennour
Relations humaines Maurice Thévenet
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