En Suisse, les ressources humaines sont chaque année passées au crible par les spécialistes. Des rapports étudient régulièrement les relations et les conditions de travail ainsi que les comportements des salariés. Cette année, les professeurs Gudela Grote, de la chaire de psychologie de l’organisation et du travail de l’EHT Zurich, et Bruno Staffelbach, titulaire de la chaire Human Resource Management à l’Université de Zurich se sont penchés sur le thème «Fautes et courage sur le lieu de travail». Ce sujet surfe sur l’actualité ces derniers temps.
Il y a faute et faute…
Les résultats de cette enquête porte sur les réponses de 1483 actifs des trois régions de Suisse : romande, alémanique et italienne. La notion de faute peut sembler subjective. Néanmoins, ce rapport fait une différence entre les fautes graves et moins graves. Par exemple, les pauses prolongées, ainsi que les efforts insuffisants au travail sont considérés comme des fautes insignifiantes. A l’opposé, les erreurs commises intentionnellement, au bénéfice de l’employé, sont considérées comme des manquements beaucoup plus sérieux. On relève par faute grave : les notes de frais intentionnellement majorées et le présentéisme improductif engendrant des heures supplémentaires. La palme des erreurs hautement punissables revient sûrement à la divulgation d’informations confidentielles à des personnes non autorisées. Ce sujet a largement été illustré dans nos médias ces derniers temps. Constat alarmant, ce genre de méfaits semble largement répandu. En effet, une personne sur quatre semble s’y être adonnée au moins une fois au cours de l’année passée…
Typologie des comportements déviants au travail
The Academy of Management Journal, Robinson & Benett, 1995
Le travailleur suisse n’est pas un délateur
Il a été constaté qu’il est relativement faisable pour un travailleur suisse de se remettre en question ou de parler de ses problèmes professionnels avec son supérieur hiérarchique. Cependant, il n’en va pas de même lorsqu’il s’agit de blâmer l’attitude de ses collègues. Les conditions de travail en général sont rarement abordées par les employés.
Le salaire reste le sujet tabou et difficile à aborder pour l’employé. C’est non seulement la peur des répercussions négatives sur ses relations avec ses collègues qui le brime, mais également le fatalisme quant aux résultats d’une telle démarche. Les salariés dont l’employabilité est la plus forte seraient plus à même d’aborder librement certains sujets délicats. A contrario, les employés manquant de sécurité seraient nettement plus absents à l’heure d’exprimer leur avis. Le manque de qualifications ou l’état physique ou psychique les empêcheraient d’exprimer leur ressenti. L’insécurité de l’emploi est également un facteur déclenchant du mutisme de certains employés.
La bonne communication du management avec son personnel est considérée comme décisive. Des prises de décisions découlant de celle-ci seraient un facteur important pour la confiance des employés et les résolutions de problèmes.
Aspirations professionnelles du travailleur suisse
La sécurité d’emploi reste une valeur importante bien qu’en baisse cette année, (14% contre 17% l’année dernière). Elle reste un critère de fidélisation à l’entreprise. Par ailleurs, près de la moitié des personnes interrogées exprime le désir de carrière traditionnelle avec des ambitions de promotion. Il a aussi été noté une hausse (21% contre 18%) des personnes désireuses de mener une carrière indépendante. Ils mettent en œuvre un développement personnel en phase avec leurs objectifs et un changement plus fréquent d’employeur. Les moins ambitieux et offrant la part belle à leur vie privé sont également en hausse (16% contre 14%). On peut noter que le marché du travail actuel, peu sécurisant, vise à augmenter les démarches personnelles, comme les changements de carrière.
L’autonomie et le travail varié est présent dans la vie professionnelle de plus de 50% des salariés. Une certaine frustration est toutefois à relever, puisque seul 15% des personnes interrogées reçoivent un retour de leur travail et que 15% estiment que leur travail a peu d’importance.
La formation est davantage présente dans les entreprises, un point positif pour l’importance du développement des ressources humaines.
Salarié suisse : heureux, mais….
Le salarié suisse se considère en général comme un salarié heureux, c’est ce que relève cette étude. Pourtant certains sujets soulevés auraient tendance à mettre en péril cette statistique. En effet, des points négatifs obtiennent des résultats assez éloquents. Par exemple, l’insécurité de l’emploi (20%), l’absence de stratégie de carrière (30%). Par ailleurs, 28% des interrogés font état d’un manque de discussion avec leur hiérarchie pour la planification de carrière. Il semblerait que, la crise oblige, les employés tendraient à être moins exigeants quant à la qualité de leurs conditions de travail.
Nous pouvons relever que surtout dans un marché de travail peu rassurant, il est nécessaire pour l’employé de faire preuve de courage pour partager ses doléances ainsi que ses craintes. Quant à l’employeur, il doit prendre conscience de certains points à améliorer. Une écoute attentive et les actions en résultant tentent à instaurer un climat de confiance et à fidéliser ses salariés.
Sources : www.portail-du-travail.ch, www.hr-barometer.uzh.ch.
Photo credits : Photos Libres
Une bonne communication au sein d'une entreprise ne peut être que bénéfique. Serait-il venu le temps où l'on pourrait enfin dire bas les masques pour désamorcer toutes les tensions?