Les plates-formes de location courte durée, type AirBnB, sont en forte croissance dans le monde entier, et Genève n’échappe pas à ce phénomène. AirBnB est le leader de ce type de location à Genève. En 2018, près de 3'000 logements entiers et environ 4'800 lits étaient disponibles sur ce site.
Comment fonctionne AirBnB et quelles sont les règles à respecter sur cette plate-forme ?
AirBnB se définit comme une plateforme mettant en relation un propriétaire (ou un locataire) avec une personne désireuse de louer un bien. La plate-forme est l’unique moyen de communication entre ces deux personnes. AirBnB se rémunère en prenant une commission sur le prix de la location, de l’ordre de 3% pour l’hôte et 6 à 12% pour le locataire.
En Suisse, une location à travers AirBnB s’apparente à de la location (ou à de la sous-location le cas échéant) et est donc régie par le Code des Obligations (art. 253 et suivants), ainsi que par l’Ordonnance sur le bail à loyer et le bail à ferme d’habitations et de locaux commerciaux.
A ceci vient s’ajouter des lois cantonales selon les cantons ; Genève dispose de la Loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation (LDTR).
Genève connaît depuis des années une pénurie de logements disponibles sur le marché locatif. On parle de pénurie de logements lorsque le taux de vacance (nombre d’appartements disponibles à la location) se situe en-dessous de 1,5%. Au 1er janvier 2020, toutes les catégories de logements à Genève (du studio aux appartements de 7 pièces et plus) ont un taux de vacance inférieur à 1,5%. On voit donc que cette pénurie touche tout type de logements à Genève.
Ces appartements proposés sur AirBnB sortent donc souvent du marché locatif classique, rendant la recherche de logements encore plus difficile à Genève. Le Canton a donc décidé de légiférer sur cette question de logements court terme, et a décrété qu’il serait interdit de louer (ou sous-louer) son logement plus de 60 jours par an sur les plates-formes de type AirBnB, ceci dès le 1er avril 2018. Cette durée a été rallongée à 90 jours par an au maximum en avril 2019. Au-delà de 90 jours, le loueur est considéré comme professionnel et d’autres lois s’appliquent.
Peut-on sous-louer un appartement sur une plate-forme de type AirBnB ?
C’est possible, mais il y a des règles à respecter. En Suisse, la sous-location de courte durée est considérée comme une sous-location « classique » (de longue durée) et est donc soumise aux mêmes règles.
La sous-location doit être acceptée par le propriétaire, sauf lors d’un ou plusieurs des cas suivants (art 262 CO) :
- Refus de communiquer les conditions: si le locataire refuse par exemple de donner le nom du sous-locataire, la durée d’une sous-location, les revenus que cette sous-location génère.
- Conditions abusives: Si le locataire gagne de l’argent sur le dos du propriétaire. Normalement, la sous-location devrait être au même prix que la location, mais l’on admet une augmentation du prix de la sous-location jusqu’à environ 20% du prix de la location. Attention, cette majoration de prix peut être attaquée par le propriétaire (ce n’est pas un dû) et doit normalement s’accompagner d’une amélioration des conditions de la location. Par exemple, le locataire loue son appartement non-meublé. Il le meuble et le sous-loue. Il s’agit d’une amélioration des caractéristiques de l’appartement.
- Inconvénients majeurs : Le propriétaire peut refuser la sous-location s’il estime qu’elle représente un inconvénient majeur, par exemple un changement trop important de sous-locataires.
On voit donc que c’est un processus administrativement lourd et que le propriétaire peut justifier d’un refus de sous-location. Le locataire risque jusqu’à une résiliation anticipée de son bail. Actuellement, si le locataire voulait être dans les règles, il devrait demander avant chaque sous-location l’aval de son bailleur.
On comprend bien qu’en pratique cette exigence est difficile à respecter, poussant donc les locataires dans l’illégalité.
Pour tenter de cadrer les pratiques de sous-location à court terme, le Conseil Fédéral a ouvert une consultation en 2018 à ce sujet. Il ressort de cette consultation que pour répondre aux besoins de la numérisation de la sous-location, le locataire n’aurait plus besoin d’obtenir le consentement du propriétaire avant chaque sous-location. En 2019, le Conseil Fédéral a décidé d’abandonner la modification de cet article 262 du Code des Obligations. Les associations de propriétaires furent soulagés par cette décision, arguant qu’elle aurait mis en péril le droit du propriétaire de refuser une sous-location, si celle-ci est jugée non-conforme.
Quel est le futur des locations à courte durée à Genève, et plus largement en Suisse ?
Malgré la décision du Conseil Fédéral en 2019 de ne pas modifier cet article 262 du Code des Obligations, il est possible que des aménagements soient faits dans un futur plus ou moins proche.
Ce phénomène de locations à court terme n’est à notre avis pas près de s’arrêter, et reflète souvent l’attractivité des villes. Il conviendra de mieux encadrer ces locations dans le futur, surtout dans les zones où le marché immobilier est tendu, comme à Genève.
Actuellement, le canton de Genève n’agit que sur dénonciation. Il y en a eu trois à l’heure actuelle et aucune n’a donné de sanction. Genève veut aussi mieux encadrer AirBnB en créant un registre AirBnB, sur lequel les bailleurs auront l’obligation d’annoncer que leur appartement est sur cette plate-forme. Le non-respect de cette règle et le dépassement de la durée légale de 90 jours pourra amener des sanctions.
Le monde évolue et de nouvelles plates-formes de service connaissent un succès qui ne se dément pas. Plutôt que de les interdire (ce qui est très difficile, tel qu’on le voit avec Uber dans plusieurs villes européennes par exemple), il faut les surveiller, les encadrer et trouver des moyens pour les villes d’en bénéficier, sans que ce soit au détriment des habitants.
Lectures complémentaires :
Le marché de l’immobilier résidentiel de luxe à Genève en 2021
Le métier du courtage immobilier en Suisse Romande
Les conséquences de la Covid-19 sur l’immobilier à Genève par Laurent Rodriguez
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