L’humain comme valeur ajoutée de l’entreprise : l’exemple de Vebego
Geneva Business News a organisé, le 12 avril dernier, un événement consacré aux tendances du recrutement en 2016, et notamment à l'adéquation entre les besoins des entreprises et les profils des candidats. À cette occasion, Louis Dittli, directeur de Vebego Genève, présentait l’exemple d'un recrutement spécifique.
Vebego, entreprise familiale de près d’un milliard de francs de chiffre d'affaires annuel et dont la maison mère se situe aux Pays-Bas, regroupe actuellement environ 150 enseignes, véritable réseau en soi d’une grande richesse humaine et d’une grande diversité.
Vebego Suisse romande est dévolue au Facility Management, soit à toutes les activités liées à la maintenance dans et autour des bâtiments, incluant des activités aussi diverses que l'entretien de chaufferies, de toitures ou de façades, le nettoyage ou la conciergerie. À Genève, l'entreprise est aussi active sous une autre enseigne : Cleaning Service.
De l’humain et pour l’humain
Le nettoyage est une activité considérée parfois comme ingrate, mais dont paradoxalement tout le monde a besoin. Celles et ceux qui oeuvrent dans ce domaine sont d’ordinaire peu valorisés au niveau social, exerçant un travail que peu souhaitent faire, car les horaires sont souvent difficiles. Louis Dittli ne cesse d’ailleurs de rappeler à ses chefs de secteur l'importance des nettoyeurs sur le terrain : ce sont eux qui, finalement, représentent l’entreprise et la font vivre.
Ce domaine présente deux particularités : d’une part, il est accessible à des candidats a priori sans qualifications et sans expérience, souvent d'origine étrangère ; d’autre part, il revêt une importance cruciale, au sens humain du terme, en donnant un emploi à de nombreux migrants, leur permettant ainsi de construire leur vie, leur famille et leur avenir. Même s'il ne s'agit parfois que d'un revenu complémentaire, celui-ci peut faire toute la différence.
Cela illustre bien le véritable rôle que joue l’emploi dans la cohésion sociale et la solidarité. En effet, plus de 100 nationalités différentes sont actuellement en emploi au sein de Vebego Suisse, car l'activité de l'entreprise n'a pas qu’un but commercial : elle a aussi vocation sociale. Vebego est ainsi engagée, à Genève, dans des programmes de réinsertion professionnelle en partenariat avec l'Hospice général.
Dans le canton de Vaud, une collaboration active s'est engagée avec l'OSEO-VD pour intégrer des candidats de l'Office cantonal de l'emploi. De même en Suisse alémanique où, là aussi, des programmes de réinsertion socioprofessionnelle ont été mis en place.
Au carrefour de l’opérationnel et du relationnel : le chef de secteur
Louis Dittli, dans le cadre de la conférence, évoque le cas particulier d'une profession qui ne bénéficie précisément ni de formation, ni d'apprentissage : le chef de secteur, poste clé au sens qu'il constitue le pilier des activités de Vebego sur le terrain.
Le chef de secteur est en charge de 20 à 30 clients, avec 80 à 150 nettoyeurs sous sa responsabilité. Ce poste exige une présence quotidienne sur les sites avec, comme impératif, le contrôle constant de la qualité des prestations fournies conformément aux engagements pris vis-à-vis des clients.
Il doit avoir la fibre commerciale et un grand sens du relationnel. Il lui faut en même temps parvenir à établir et à maintenir le contact avec le client, connaître et maîtriser le cahier de charge, connaître aussi chacun des nettoyeurs de son secteur, en n’oubliant jamais que l’être humain est au centre des priorités.
Chez Vebego, les salaires représentent 80% des charges. Il faut donc parvenir à trouver sans cesse le juste équilibre entre des employés parfois peu qualifiés et des prestations de qualité.
Le chef de secteur est ce trait d’union, au carrefour de l’opérationnel et du relationnel, qui doit être rigoureux mais sans excès, afin d'éviter une rotation trop importante du personnel. Il devra également être à même de gérer une partie administrative pour le personnel sous sa supervision.
Les difficultés spécifiques du recrutement en Suisse : les langues nationales
Ce poste est exigeant. Il a fallu six mois à Louis Dittli pour trouver la perle rare. En effet, si les candidats furent nombreux, beaucoup ont été rebutés par ces exigences, particulièrement par la flexibilité qu’il requiert, les horaires coupés et la nécessité d’établir sa propre planification.
L'autre difficulté lors du recrutement d’un chef de secteur est la langue. Vebego ayant son siège en Suisse alémanique, une partie de son personnel doit connaître l’allemand, même avec des notions de base, afin de gérer les cahiers des charges, d’échanger des courriels, de faire des téléphones dans cette langue.
Louis Dittli souligne la grande importance de l'allemand pour les entreprises suisses, avant même celle de l'anglais.
Vebego Suisse romande a récemment rencontré cette difficulté dans le cadre du recrutement d'une responsable RH, laquelle devait à la fois posséder une formation valide et la maîtrise de l'allemand, recrutement qui — ici aussi — a pris un temps considérable pour ces seuls deux critères.
Pour les entreprises nationales, la Suisse romande et la Suisse alémanique sont liées et interdépendantes — sans oublier la Suisse italienne. Nombre d’entre elles, basées en Suisse alémanique, aspirent à s'implanter en Suisse romande et inversement.
La connaissance des langues nationales par leur personnel est un besoin fondamental et, à ce titre, une compétence déterminante pour les candidats. Cela ressort d'autant plus dans le secteur du Facility Management, où le travail de terrain, le relationnel et la communication sont déterminants.
Les étapes du recrutement
Les étapes du recrutement sont classiques : publication d'une annonce (média papier, Internet…), activation du réseau, appel aux structures traditionnelles de placement. En l'occurrence, toujours dans le cas particulier du chef de secteur, c’est par le biais de son propre réseau et grâce à ses anciens contacts que Louis Dittli est finalement parvenu à trouver le bon candidat.
Une fois le CV entre les mains des RH, celles-ci déterminent si le profil correspond au cahier des charges. Dans un second temps, le candidat est contacté par téléphone et son niveau d'allemand est évalué. La troisième étape est l’entretien d’embauche.
Pour Louis Dittli, une synergie est à faire, dans le regard porté sur le candidat lors de l’entretien d’embauche, entre un postulant validé par les RH ou par les responsables opérationnels.
Les RH s'assureront que le profil du candidat correspond aux attentes particulières de l'entreprise, que le CV et le parcours du candidat soient cohérents et homogènes, le parcours professionnel stable.
L'opérationnel, lui, s'intéressera en priorité à la motivation, à l'enthousiasme du candidat pour le poste : sera-t-il à même de s'investir dans son travail pour l'entreprise ? Et, en arrière-plan, ce point est plus important encore, pour le client qui, dans tous les cas, devra être satisfait des prestations fournies.
Louis Dittli insiste encore sur deux points : la qualité relationnelle du candidat, son entregent, mais aussi sa souplesse quant aux horaires, son adaptabilité, dans la mesure où le poste requiert d'avoir parfois à faire face à des imprévus.
Les procédures et protocoles de travail pourront sans difficulté être enseignés à l'employé lors des formations internes, mais seul l’employé pourra, de lui-même, apporter à l’entreprise son enthousiasme et son engagement personnel. Les aspects si particuliers et les contraintes des professions liées au nettoyage exigent intrinsèquement que l'employé soit intimement motivé.
En dernier lieu, la décision finale quant à un postulant sera évidemment prise d'un commun accord entre les RH et l'opérationnel.
Pour en savoir plus sur les activités de Vebego, lisez notre interview : Du global au local, la société Vebego au service de l’innovation et de la collectivité
Des compétences au parcours de vie : des atouts à mettre en avant
Sans nécessairement s'en rendre compte, l'individu se transforme, avec la tendance de se reposer sur ses acquis. Or, personne, à l’heure actuelle, n'est à l'abri d'un accident de vie. Chacun peut, du jour au lendemain, se retrouver sur le marché de l'emploi et réaliser soudainement qui lui manque telle ou telle compétence, ou qu'elle n’est plus à jour.
Pour Louis Dittli, il est important qu'une compétence acquise, comme la maîtrise d'une langue, soit maintenue, entretenue, développée. Cela ressort particulièrement lors des évaluations annuelles de chaque employé. Préserver ses acquis et ses compétences est le meilleur investissement que l'on puisse faire à l'égard de soi-même si l'on se projette sur le long terme.
Il en irait de même, par exemple, dans le cas d’un candidat ayant la maîtrise de plusieurs langues, y compris de l'allemand, mais dont le CV, le parcours professionnel, le parcours de vie présenteraient des « interruptions ». C'est là que l'entretien individuel et l'approche humaniste revêtent toute leur importance.
L’entreprise aura pour tâche d’apprendre à connaître son candidat : s'agit-il d'une année sabbatique, d’un changement de priorité (naissance, éducation des enfants…) ou peut-être encore d’une difficulté, comme une perte d’emploi ? Dans tous les cas, pour Vebego et Louis Dittli, il s'agira d'un enrichissement, d'une expérience humaine, de compétences transversales précieuses.
Vebego est parfaitement consciente qu'à l'heure actuelle, la plupart des gens seront passés par une ou plusieurs périodes de chômage, auront décidé de se réorienter, ou auront privilégié d'autres priorités d'ordre privé.
Des perspectives d’avenir
La Suisse a du retard, en comparaison à d'autres pays, dans le domaine du nettoyage, au sens où cette activité s'accomplit, comme il a été dit, le matin ou le soir, les clients ne souhaitant pas de prestations fournies en journée. C’est une triste réalité : on ne veut pas croiser le nettoyeur.
Ici encore, il est cependant possible de transformer un élément négatif en élément positif.
En effet, un employé peut tout à fait décider de commencer son activité avec deux ou trois heures de travail par jour, puis demander que son taux d'occupation soit progressivement augmenté, au fur et à mesure qu’il acquiert plus de compétences, d'autonomie et de responsabilités.
Pour l’employé, cela représente une grande souplesse, tout en permettant à l’entreprise de le valoriser.
Une personne débutant sa carrière comme simple nettoyeur peut, ainsi, naturellement envisager d’accéder aux postes de contrôleur, de chef de secteur, ou de chef d'exploitation.
Comme généralement dans le domaine des prestations de service, Vebego est une société en pleine croissance, se développant rapidement, et qui cherche de plus en plus souvent des candidats susceptibles d'assurer des postes tels que celui de chef de secteur. Ainsi existe-t-il, pour celles et ceux qui s’engagent dans cette voie, de belles perspectives d’avenir.
Photo credit : renaud.goudal@bluewin.ch
Article très intéressant concernant une entreprise aussi vaste que discrète. La connaissance des langues, notamment de l'allemand, est un atout non négligeable qu'il s'agit de mettre en avant et dont l'apprentissage devrait être grandement encouragé.