La médiatisation des migrants d’origine subsaharienne traversant la mer Méditerranée sur des bateaux surchargés, nous donne une image complètement erronée du migrant provenant d’Afrique subsaharienne.
En effet, selon l’Office International des Migrations (OIM), plus de 80% de ces migrants partent vers un autre pays subsaharien.
Les migrations intra-africaines
La réalité des migrations africaines se joue donc principalement sur le continent lui-même, avec autant de vagues d’immigration et de contextes de départ ou d’arrivée.
De plus, la migration intra-régionale africaine est largement supérieure à la migration extra-régionale. En 2017, selon le Rapport 2018 de la CNUCED sur le développement économique en Afrique : Les migrations au service de la transformation structurelle, les migrants se dirigent vers cinq pays principaux : l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire, l’Ouganda, le Nigeria, l’Éthiopie.
Comme l’Europe, l’Afrique subit des vagues d’immigration, mais également des vagues de xénophobie. En effet, il ne faut pas oublier que l’Afrique est multiple et diverse, avec 54 pays et plus de milles ethnies différentes.
Dans cet article, nous nous demanderons quelles sont les causes de ces migrations intra-africaines, vers quels pays se rendent les migrants et enfin qui sont-ils.
L’histoire très récente de l’immigration africaine contemporaine permet de distinguer différentes vagues d’immigration.
Les quatre grandes vagues de migrations du XXème et XXIème
- Les premières vagues débutent dans les années 60-70. Au sortir des colonisations, l’Europe vient chercher en Afrique la main d’œuvre peu qualifiée dont elle a besoin, avec l’essor économique des trente glorieuses. Ces vagues concernent majoritairement le Maghreb et dans une moindre mesure l’Afrique subsaharienne.
- Les secondes vagues sont dues aux guerres et aux nombreuses instabilités dans plusieurs régions d’Afrique, comme par exemple, lors des conflits au Liberia, en Angola, au Congo, au Sud Soudan, au Rwanda, en Somalie, en Érythrée… Celles-ci entraînent de grands déplacements de population dans le monde, avec des demandes d’asile en Europe, en Amérique du Nord ainsi que dans les pays voisins.
- Les troisièmes vagues, elles, ont débuté dans les années 2000. Elles se caractérisent par la formation des migrants de haute classe sociale, qui se forment dans des universités occidentales, pour le plus souvent rester en Europe à la fin de leurs études.
Depuis quelques années, les dernières vagues sont actuellement internes, et peuvent pousser à l’externe.
- Les dernières vagues sont dues principalement à des causes économiques, bien que la composante « refugié » soit toujours très présente en raison de problèmes d’instabilité politique ou de problèmes climatiques. En parallèle à cette migration africaine, on peut également noter une nouvelle immigration d’origine asiatique au sein de l’Afrique. En effet, les Chinois, par leurs investissements colossaux, font venir énormément de personnes.
C’est cette dernière migration qui nous intéresse, parce qu’elle nous est contemporaine, et peu expliquée en Europe. Elle se décline en plusieurs pôles.
Plusieurs pôles de migrations intra-africaines
La Côte d’Ivoire
Il existe un premier pôle autour de la Côte d'Ivoire.
Au départ, la Côte d’Ivoire était un pays peu peuplé, qui avait besoin de main d'œuvre pour exploiter ses richesses. Cela a donc attiré des populations environnantes plus pauvres, principalement en provenance du Mali, du Burkina Faso, de la Guinée et du Sénégal, bien que ce dernier dispose de grandes richesses.
Le Nigeria
Le second pôle s'est construit autour du Nigeria, qui lui aussi a attiré des populations originaires d’autres pays, notamment du Ghana, du Bénin, en raison de son exploitation pétrolière.
Le Sénégal
Le troisième pôle est le Sénégal, qui pour des raisons historiques, brille d’une certaine reconnaissance et d’un certain prestige. En effet, elle reste l’ancienne capitale de l'AOF (Afrique-Occidentale française) attirant les ressortissants de tous les pays voisins, comme la Guinée ou le Cap-Vert.
L’Afrique du Sud
Le dernier pôle est lui concentré autour de l'Afrique du sud avec ses mines d'or et ses diamants. Il attire énormément, que cela soit le Zimbabwe, le Mozambique ou encore des habitants de l'Afrique centrale et occidentale.
Nous pouvons remarquer que ces migrations internes sont dirigées par la volonté de vivre économiquement mieux : les personnes qui se déplacent se dirigent prioritairement vers les pays voisins pour exploiter, soit les terres, soit les richesses minières ou pétrolières.
Pourquoi aujourd’hui, les causes de l’immigration sont-elles économiques ?
Aujourd’hui, la migration est économique, parce que la croissance économique de l’Afrique ne s’accompagne pas d’une réduction effective de la pauvreté. Elle ne génère pas suffisamment d’emplois durables pour tous. En effet, elle est marquée par une forte inégalité dans le partage des richesses, au profit des entreprises multinationales et des élites politiques qui ne veulent pas lâcher le pouvoir.
Bien sûr, il ne faut pas faire une généralité. Cela ne concerne pas, dans une même mesure, les 54 pays que forment l’Afrique. Cependant, cela a un effet sur l'ensemble des pays, car l’instabilité politique et l’insécurité provoquent des conflits et des déplacements de populations qui s’enchaînent, comme des dominos et ont des répercussions sur chaque pays.
En effet, comme expliqué plus haut, dans les cas extrêmes, les pays sont en guerre, ce qui crée bien évidement des déplacements de population, qui engendre à ce moment-là, une migration de refuge.
D’où viennent les migrants ?
On estime à peu près que 80% des migrations qui s'opèrent à l'intérieur du continent africain est due principalement aux populations d'Afrique de l'Ouest. Les nombreuses études sur la question ont montré qu’en comparaison, les populations d'Afrique centrale circulent moins à travers le reste de l’Afrique. Cela a certainement un lien avec les problèmes politiques importants dans les zones environnantes qui empêchent un déplacement fluide.
Comment réagissent les pays d’accueil ?
L’Afrique n’est pas épargnée par la xénophobie et le racisme. En effet, les relations avec les autochtones peuvent s’avérer compliquées, avec de nombreuses tensions liées à des conflits d’intérêt. Par exemple, les migrants ne peuvent pas compter sur les forces de l’ordre pour les aider, face aux réactions de rejet, dans la plupart des cas. En effet, les autorités sont le plus souvent délétères, car l’État de droits existe peu et n’est donc plus à même de réguler les tensions sociales.
Conclusion
Nous pouvons conclure que contrairement aux idées reçues, ce n’est pas la misère qui chasse les individus de leurs pays, mais c’est bien la demande en forces de travail ou l’existence de postes de travail délaissés par les autochtones qui génèrent l’immigration.
Ensuite, on note que les migrations de travail, lorsqu’elles s’inscrivent dans la durée, supposent la mise en place d’une intégration de longue durée, et de fait, d’un système de regroupement familiale au sens large.
Les besoins économiques du pays d’accueil et la recherche de la sécurité sont les deux raisons essentielles des mouvements migratoires en Afrique subsaharienne. Souvent seuls au départ, les migrants de longue durée finissent par ramener leurs familles là où ils ont déposé leurs valises.
Qu’il soit en Europe, en Asie ou dans un autre pays africain, le Subsaharien fait face à la même réalité, celle du migrant qui n’est jamais accueilli à bras ouverts et qui pourtant travaille et contribue au développement de son pays d’accueil.
Sources :
Les migrations internes au continent africain : https://journals.openedition.org/hommesmigrations/280#notes
Les causes de l’émigration en Afrique : http://info241.com/les-causes-de-l-emigration-en-afrique,3165
« 80% de la migration sur le continent est intra-africaine» :
https://afrique.latribune.fr/politique/politique-publique/2017-04-17/anti-cliche-80-de-la-migration-en-afrique-ne-se-fait-pas-vers-les-pays-du-nord-interview.htm
https://unctad.org/fr/Pages/PressRelease.aspx?OriginalVersionID=456
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Votre analyse est intéressante. Nous la publions dans notre revue, Le Migrant.