Du style codifié au message tape à l’œil, les enseignes lumineuses à caractère commercial sont d’usage lorsque, une fois la nuit tombée, une marque souhaite se signaler au plus grand nombre. Exemple frappant à Genève, les installations situées sur les toitures de la prestigieuse rade du bout du lac réunissent à elles seules les effigies du luxe made in Switzerland. Horlogerie, banques, Hôtels de haut standing, les signalétiques grand format en imposent.
A l’inverse, la plaine de Plainpalais accueille depuis 2006 un projet original d’art public : Neon Parallax. Officiellement inauguré en 2012, des enseignes d’un nouveau genre tordent délicatement le cou aux étendards consuméristes qui ont pour habitude de polluer notre espace visuel.
Un postulat à contre-courant
Les Fonds d’art contemporain de la Ville (FMAC) et du canton (FCAC) de Genève ont conçu en plein cœur de la cité, une exposition à ciel ouvert réunissant 9 installations lumineuses d’artistes suisses et internationaux.
Transposer les enjeux publicitaires des enseignes commerciales de la rade en messages artistiques, tel est le défi qu’ont relevé les artistes invités à participer à des concours de portée internationale
Le caractère singulier et innovant de l’approche érige la plaine de Plainpalais en véritable carrefour de l’imaginaire et fait la part belle au concept plus terre-à-terre de l’enseigne publicitaire. La démarche artistique permet de reconsidérer l'environnement urbain comme un espace commun, en invitant l’ensemble de la population à y porter un regard neuf.
Pas de révolte ici, mais une proposition éclairée.
« L’ODREE N’A PAS D’IPMROTNCAE »
La lisibilité d’un mot peut fonctionner malgré le désordre des lettres qui le compose, pour autant que la dernière et la première soient bien placées. La fulgurance de la mise en forme se fait automatiquement. Le cveraeu est dtoé de capciatés éotanntes. Ann Veronica Janssens le constate.
Ayant pour habitude d’explorer la relation du corps à l’espace, l’artiste belge reconstruit l’acte de percevoir, en confrontant le spectateur à des dispositifs qui provoquent une expérience sensorielle. Ici, elle mesure à l’épaisseur des mots, et ce dès la première lecture, que son message déconstruit sera compris de tous. L’enseigne, installée en 2012, se conjugue au présent et en majuscule. Une phrase tridimensionnelle qui s’adresse à notre esprit et cache un secret qui n’en est pas un.
Car si l’artiste nous surprend, elle nous livre bien plus qu’une pensée. Le sens et la forme convergent. La formule se révèle utile puisqu’elle propose une réflexion plus profonde sur le poids de l’ordre dans notre quotidien.
Les œuvres les plus visibles sont parfois les plus discrètes
D’abord parce qu’elles déplacent l’attention. Ensuite parce qu’elles abordent de façon subtile les problèmes existentiels. A bien des égards, pour son originalité et surtout pour sa capacité à nous surprendre, les 9 installations du projet Neon Parallax lient, d’un même tour de main, messages visuel et cognitif.
Au bénéfice du doute, il vous faudra simplement lever le regard. Et comprendre.
Crédit photo : Neon Parallax