À l’ère du numérique et de l’ultra rapide, de la consommation et du standard de luxe, pouvons-nous vraiment affirmer avoir fait un progrès en nous comparant aux anciennes générations ? Et si tel est le cas, pourquoi sommes-nous malheureux ou insatisfaits ?
Société digitale : un réel progrès ?
Si vous faites partie de ceux qui ont eu les premiers portables avec antenne extensible, qui ont joué à la Gameboy et qui aujourd’hui ont un smartphone ou un iPhone tactile, vous remarquerez plus que d’autres qu’aujourd’hui, au lieu d’utiliser tous nos muscles et nos neurones, nous bougeons à peine nos doigts et que notre cerveau élabore de nombreuses informations de manière passive plutôt qu’active.
Vous n’êtes pas assez vieux ou vieille pour commencer des phrases en disant « De mon temps… », pourtant plusieurs éléments vous font parfois vous sentir en décalage.
Face à des situations absurdes (comme par exemple, penser à filmer une scène d’accident pour la diffuser sur les réseaux, au lieu de porter secours) ou quand vous vous remémorez votre vécu, vous vous interrogez peut-être sur les progrès de la société et sur votre positionnement.
Quand nous voyons tout ce qui se passe dans le monde, que nous nous fions de plus en plus à des machines et que nous ne savons plus utiliser notre logique, une question surgit : faut-il suivre aveuglement la société ou faire de la résistance ?
Ni l’un ni l’autre. C’est bien d’accepter les commodités et les avantages du progrès et de savoir les apprécier à leur juste valeur, cependant il ne faudrait pas oublier que parfois les vieilles méthodes peuvent être plus rapides, directes et utiles. Il faudrait ce juste milieu que nous avons tant de peine à atteindre, certains plus que d’autres, surtout si vous faites partie de cette tranche de personnes ayant grandi entre deux cultures et qui ont le sentiment d’être « ni chair, ni poisson ».
Décalage entre cultures, nouvelles et anciennes générations, entre ville et campagne reculée
Nous vivons dans une Genève internationale qui veut que nous soyons proactifs, carriéristes, rentrant dans le moule et en même temps épanouis dans notre vie personnelle ou familiale, etc.
Or, dans d’autres cultures, cela semble incohérent parce que tout tourne autour de la famille et non de la carrière. Il ne faut pas aller chercher bien loin pour trouver un tel schéma, pour ceux qui connaissent, la campagne d’Italie du sud correspond déjà au fin fond de l’Afrique ou à l’Europe de deux siècles en arrière.
Le décalage est parfois plus qu’énorme. Pas de wi-fi, parfois même, le téléphone fixe ne marche pas. Pourtant, là-bas, tout semble suivre un schéma linéaire (naissance, école, fiançailles, mariage, enfants et vie commune jusqu’à la fin de ses jours), alors qu’ici, la ville de Calvin offre de nombreuses opportunités et libertés, mais aussi des contradictions.
Il faut travailler davantage afin d’avoir plus d’argent pour partir en vacances. Il faut supporter le stress quotidien au travail pour se permettre une heure par semaine au spa ou au yoga. Nous devons travailler afin de pouvoir payer quelqu’un d’autre pour garder nos enfants au lieu de le faire nous-mêmes.
Cela donne l’impression que nous sommes obligés de suivre des chemins plus compliqués, pour arriver à des fins qui ne devraient pas nous coûter autant d’énergie et parfois de burnouts.
Un modèle de vie saine
Giovannina Morelli, 21.01.1934 - 29.06.2017, Fragneto L'Abate (BN - Italie)
Le récent décès d’un proche d’un petit village à deux heures de Naples et la vie qu’elle a menée (tout comme d’autres paysannes de sa génération) nous portent à nous interroger : son mode de vie semble presque incompatible avec l’évolution que nous vivons en 2017, et pourtant, cela coexistait bel et bien et prouve qu’une autre manière de vivre est encore possible. Cela donne place à un questionnement sur le sens que nous donnons à notre vie et les choix que nous faisons.
Cette dame de 84 ans était une femme simple et joyeuse qui a eu la chance de ne jamais connaître un seul jour de stress de sa vie. Pourtant, elle n’a jamais fait de yoga, ni de bains thermaux, ni de séances beauté chez l’esthéticienne.
Elle a travaillé presque tous les jours de sa vie, sans regarder si c’était un jour férié ou un weekend. Elle n’a jamais pris de vacances et le comble est qu’elle n’en a même pas ressenti le besoin, elle en a juste parfois eu la curiosité en entendant les expériences à l’étranger des autres.
Elle n’est pas allée à l’école non plus (donc ne savait ni lire, ni écrire), ne savait pas se servir des téléphones fixes et portables, mais elle a adoré connaître la télévision noir et blanc (qui a fonctionné de 1980 jusqu’à 1993… chose rare de nos jours), et celle en couleur avec sa chaîne préférée MTV et VIVA car elle adorait la musique. Elle a travaillé dans les champs avec les hommes, et s’occupait un peu (mais vraiment très peu) de la maison et des repas, et c’est tout. Elle était connue pour son exubérance, son esprit jeune et pour aimer la fête et être de bonne compagnie. Elle ne faisait pas de broderies, de couture, ou autre activité de grand-mère de son temps ou de gym pour les aînés comme celles de notre époque.
Elle prenait juste le temps de VIVRE. Vivre, respirer, regarder la nature autour, être présente avec les autres et s’amuser. Et elle, comme les autres, se donnaient le temps de faire les choses et de bien les faire.
Une vie en communauté très riche et de partage sans écrans
Les familles se réunissaient et dansaient après le repas de midi, avant de reprendre le travail dans les champs. Le soir elles se retrouvaient autour de la table ou de la cheminée pour parler, jouer aux cartes ou danser à nouveau, et pendant les fêtes de Carnaval, elles fêtaient jusqu’au petit matin même si elles se levaient à 6.30.
Il n’y avait pas de chef, mais tous étaient très disciplinés et même après une longue journée, personne ne se plaignait d’être fatigué. Cette dame avait les yeux plein de vie et d’enthousiasme en se rappelant des jours dans les champs et des nuits de fêtes et de bals. Elle n’aurait pas échangé sa vie pour la nôtre. Elle était ouverte aux nouveautés, au savoir, les progrès techniques dans le champ agricole, mais elle redoutait le côté solitaire, individualiste que cache l’indépendance.
Les seules choses qu’elle aurait aimé faire sans y parvenir, c’était d’aller en discothèque et connaître Genève. Toutefois, elle a vécu sa vie pleinement, sans regrets, joyeuse, avec des petits brins de folie et beaucoup de légèreté. Serions-nous capables d’en faire de même ?
Si vous êtes sincère avec vous-mêmes, vous vous rendrez compte que vous aimeriez peut-être apporter des petits (ou grands) changements à votre vie. Nous verrons dans la prochaine partie, que même dans une société bruyante, stressante et qui nous sollicite sans arrêt, il est possible d'apporter ces changements parfois juste avec quelques petites astuces, afin de (re)trouver l'essentiel est être en accord avec soi-même.
Photo credit : © Ampack | Dreamstime; CVTà Street Fest
J'ai aimé cet article qui laisse à croire encore possible au travers du récit de cette vieille dame, que l'on puisse encore s'autoriser à rêvasser et à être juste en accord avec soi-même et les éléments qui nous portent à nous surprendre à être soi-même et non pas l'image que la société nous oblige à forger malgré nous... de penser encore possible que la "vraie vie" est de pouvoir "aspirer à être soi-même", sans artifices et sans avoir à "se prouver" à soi-même ou à la société dans laquelle on évolue que l'on est des "êtres capables d'agir"... Merci pour cette belle fenêtre d'ouverture... sans elle, nous pourrions tendre à une forme d'aliénation perpétuelle du faire à l'infini sans pouvoir, peut-être goûter au plaisir pur...