En tant que journaliste spécialisée, quelles ont été vos motivations pour devenir rédactrice en chef de Cominmag ?
Avant ce poste, j’avais collaboré avec PME Magazine, l’Agefi et l’Hebdo, toujours dans des thématiques liées au marketing et à la communication. L’aventure Cominmag a pu commencer parce que j’avais cette expertise. Tout a démarré par un coup de téléphone où l’on me proposait les rênes du projet, la veille d’un départ en vacances. Comme je n’avais rien sollicité, je suis arrivée à l’entrevue très à l’aise. Je leur ai dit « si ça ne fonctionne pas, on en reste là ». Ils m’ont écouté, et à la fin, une personne a sorti une feuille qui résumait ma vision B2B pour le développement du magazine.
Quels sont vos principaux défis en tant que rédactrice en chef pour pouvoir toujours jongler entre la publication online et le print ?
Mon défi, c’est de continuer à me dépasser. J’ai beaucoup de chance de gérer l’éditorial en solo, ce qui me confère une liberté précieuse mais me laisse seule au front du site et du magazine. La répartition des thématiques entre ces deux supports est, somme toute, facile à faire compte tenu du rythme différent entre le web et le mensuel. Ainsi toute l’information que je mets sur le web, je ne peux pas la transposer à l’identique sur le magazine. Je dois y apporter de la valeur ajoutée. Le blog a été ouvert en 2005. C’est parce que j’avais des brèves dont je ne savais que faire, que j’ai démarré sur WordPress. Aujourd’hui, la valeur de ce site est l’archivage de ces nouvelles. Sa force est ma capacité à rebondir quasi en temps réel, à l’actualité de la branche de la communication en Suisse romande.
Depuis maintenant trois ans, vous créez et co-animez les Awards du Meilleur du Web. Quels sont les résultats ?
Il est essentiel d’avoir une traçabilité. Le développement du web a suscité la création de nombreuses agences que les annonceurs ne connaissent pas. Un descriptif sur un site n’est pas suffisant.
Avec ce prix nous essayons de donner de la traçabilité. Notre petite équipe – Rodophe Koller, rédacteur en chef de ICT Journal, Thierry Weber, CEO de Breew et moi-même – ne pouvons que nous réjouir de l’augmentation des projets inscrits. Aux agences ensuite de profiter de cet éclairage B2B et médiatique.
Quels sont vos critères pour déterminer le vainqueur de ces Awards ? Qu’est-ce qui constitue du bon travail pour vous ?
Les mandats réalisés par des agences romandes ou des clients romands peuvent concourir. Un jury d’expert fait la sélection et lors d’une soirée de remise des prix, nous révélons les vainqueurs. Nous primons neuf catégories : création, innovation, efficacité business, marketing en ligne, campagnes à la performance, campagnes de branding, usability, technologie et mobile.
Pour que la fête soit belle, nous choisissons avec soin nos maîtres de cérémonie. Vinvin, le concepteur-animateur de l’émission sur France 5 « Le Vinvinteur » a été notre premier MC. L’an dernier, c’est Darius Rochebin qui a accepté ce rôle. Je ne dirai rien sur le choix de cette année… c’est encore secret !
Quel est l’état actuel de la formation des métiers de la communication et dans quelle mesure est-elle reconnue par les entreprises ?
Il existe des formations digitales dans des écoles privées, des universités... Le public a souvent du mal à s’y retrouver. A chaque fois que l’on me pose la question, je réponds que le bon choix se fait en fonction de ses besoins et non de l’offre existante sur le marché.
Et dans quelles mesures ces formations sont-elles reconnues par les entreprises ?
A l’heure actuelle, les entreprises ne reconnaissent pas que les certifications traditionnelles en marketing, car elles connaissent peu ou prou les nouvelles formations. La nouveauté avec le digital, c’est que ce sont les collaborateurs des entreprises qui sont en demande. Ils comprennent que ne pas avoir de diplôme en digital va nuire à leur carrière. Alors, en fonction de leur cursus scolaire, universitaire ou professionnel, ils choisissent une formation sur-mesure.
Qui peut trancher en cas de mauvaise prestation d’une agence, si le client est insatisfait ?
En Suisse, le rôle des associations faîtières, comme Publicité Suisse ou le bsw leading agencies, est déterminant. Les annonceurs qui ont eu de mauvaises expériences avec leur prestataire ont un interlocuteur vers qui se tourner et peuvent bénéficier d’une aide juridique.
Quel est le maître-mot dans votre profession ?
Travail ! Les médias spécialisés s’adressent à des professionnels. On se doit d’être à la hauteur de leurs connaissances. On joue aussi un rôle de construction de marché qui n’est pas négligeable. Il font donc trouver un juste milieu entre l’information et la communication.
Que pensez-vous du "citizen journalist" ?
Si par ce terme, on entend du participatif où tout un chacun peut poster une information sur un blog ou un réseau social, je suis pour. Mais, si on laisse croire à ces personnes qu’elles font du journalisme, je dis non. Ce métier a des règles auxquelles les bloggeurs ne sont pas astreints.
Dans quelle mesure la crise financière de 2008 a-t-elle impacté le marché de la communication ?
La crise économique a accéléré le développement du digital. L’illusion de la gratuité, la promesse de e-ventes ont poussé les marques à s’intéresser au web puis au 2.0.
Quels sont les métiers de demain ?
Il y en a un : le Chief Datas Officer. Ce sera le chef d’orchestre autour duquel tous les autres métiers du marketing et de la communication tourneront, car il sera le seul à savoir interpréter tous les métriques des médias off et online et il pourra ainsi interpréter et anticiper toutes ces données. Il y a encore très peu de personnes formées sur le marché.
Imaginons que vous avez une machine à voyager dans le temps, quel conseil vous auriez-vous donné ?
D’apprendre la programmation. Savoir ce qu’il y a à l’intérieur du web est aussi important que de connaître les outils digitaux.
Quel conseil pouvez-vous donner aux jeunes communicants ?
Restez curieux. Ce qui est vrai aujourd’hui ne le sera pas demain. Il y a encore peu, on apprenait un métier et c’était pour la vie. Ce n’est plus le cas. Par conséquent, il faut avoir le courage de sortir de sa zone de confort. Il ne faut pas se laisser endormir par les compliments et rester, comme disait Steve Jobs toujours "assoiffé de connaissances".
Si vous aviez carte blanche, avec un budget limité, quel type de professionnel intégreriez-vous au sein de Cominmag?
Ce serait des journalistes avec une sensibilité pour la communication et le digital. Un profil très rare…
Qu’est-ce une campagne parfaite pour vous ?
Une campagne transmédia. C’est à dire une campagne qui s’adapte aux médias et qui ne se contente pas de décliner une idée publicitaire sur différents supports. L’exemple parfait, c’est Chipotle, lauréat du Grand Prix des Cannes Lions 2012. Cette chaîne de TexMex a changé son positionnement. Pour mettre en pratique son nouveau slogan « Cultivate a better World », elle a établi un programme de loyauté avec ses fournisseurs, organisé un festival, lancé un spot TV, construit une vraie présence sur les réseaux sociaux. Résultat, cette marque a gagné de l’argent en communiquant. C’est totalement nouveau !
En Suisse, quel exemple avons-nous de ce type de comunication ultra rentable ?
Peut-être l’opération Graubünden de l’agence Jung Von Matt. Ils ont bien innové avec cette opération sur Facebook, mais je ne sais si ce village a vu une explosion du tourisme.
Dans une prochaine vie, je serai très forte pour convaincre de faire des opérations comme la charte avec les agriculteurs.
Si vous travailliez en agence de communication, quelle serait votre activité rêvée ?
Planner Stratégique.
Dans quel type d'agence ?
Une agence digitale, of course !
Comment faites-vous pour être si créative et si dynamique ?
Ciel et moi qui ai toujours l’impression de ne pas en faire assez…. Merci du compliment.