La loi et la pratique comptable suisse autorisent d’avoir des réserves de fonds propres qui n’apparaissent pas au bilan en fin d’exercice comptable.
Il s’agit des réserves latentes, aussi appelées réserves cachées qui représentent le capital propre dissimulé. Le but est d’offrir à l’entreprise une sécurité pour les années sombres.
Comment créer ces réserves latentes ?
Elles sont essentiellement engendrées par :
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La sous-évaluation des actifs
Les actifs sont inscrits au bilan pour des valeurs inférieures à leurs valeurs réelles.
Il s’agit par exemple d’enregistrer le stock de marchandises à une valeur plus basse que sa valeur d’acquisition ou pratiquer des amortissements plus élevés que la perte de valeur réelle.
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La surévaluation des passifs
Les passifs sont inscrits au bilan pour des valeurs supérieures à l’engagement réel de l’entreprise.
Cela signifie par exemple de maintenir au bilan des provisions superflues qui pourraient être dissoutes, d'indiquer des engagements fictifs ou d'appliquer un taux de change excessif.
Les entreprises qui établissent leurs comptes selon la loi comptable suisse sont autorisées à disposer généralement de 2 types de comptes en fin de période comptable :
- Les comptes externes ou publiés qui sont destinés aux actionnaires, le grand public, les autorités fiscales, les créanciers et peuvent contenir des réserves latentes.
- Les comptes internes qui sont destinés au management servant d’instrument de contrôle et de base pour les décisions. Ils ne contiennent pas de réserves latentes.
C’est l’application du principe de prudence dans l’établissement du bilan selon la loi suisse, art. 960 CO qui permet ainsi de renforcer la stabilité de toutes les formes d’entreprises sur le long terme.
Du point de vue économie d’entreprise, on distingue 4 différentes catégories de réserves latentes :
- Les réserves d’appréciation ou de prudence résultent d’une politique plus que prudente des amortissements (ex : sous-estimation de la durée d’utilisation d’immobilisations corporelles
- Les réserves obligatoires ou forcées résultent principalement, pour des raisons fiscales de la non-réévaluation des immeubles ou la provision ducroire (provision pour créances douteuses)
- Les réserves arbitraires ou d’administration résultent des provisions et correction de valeur sans justification économique afin d’influencer le résultat publié
- Les réserves de remplacement résultent de l’amortissement sur la valeur de remplacement et servent à préserver la substance dans les périodes d’inflation en empêchant la présentation et la distribution de bénéfices fictifs
Avantages et inconvénients des réserves latentes
Une entreprise qui a des réserves latentes dans son Bilan fait baisser sa charge fiscale, distribue moins de bénéfice, a plus de capacité d’autofinancement et plus d’indépendance financière et de souplesse.
En revanche, il faut tenir compte du fait qu’il aura une perte de transparence de droit à l’information aux actionnaires et bailleurs de fonds, ce qui remet en question le principe selon lequel les comptes doivent donner l’image fidèle de la situation économique de l’entreprise et l’authenticité du bilan.
Il faut noter que les normes comptables internationales (IAS/IFRS) et anglo-saxonnes (US et UK GAAP) interdisent la pratique de réserves latentes et qu’il n’y a normalement pas de réserves latentes dans les états financiers établis selon les normes autres que le code des obligations, internes et analytiques.
C’est pour cela que le législateur impose aux sociétés de capitaux de mentionner toute dissolution de réserves latentes dans l’annexe aux comptes annuels.
Les réserves latentes ne sont ni des valeurs patrimoniales, ni des montants liquides mais permettent à l’entreprise de réduire, ou même d’éviter un déficit prévisible en les dissolvant. Ainsi l’entreprise apparaît sous un meilleur jour aux yeux de l’extérieur.
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