Indispensable en Suisse, la traduction de qualité y est très recherchée. Elle reste l’apanage de traductrices et traducteurs ayant le don de transposer les idées d’une langue à une autre tout en nuances et de donner ainsi à leurs traductions la facture de la langue de destination.
Faisons connaissance avec Sylvie Ulmann, traductrice et journaliste indépendante qui a accepté de répondre à nos questions.
Une traductrice au parcours atypique
Cette femme énergique et pleine de ressources a débuté sa carrière professionnelle dans l’enseignement du français à des élèves de langue étrangère, un rêve d’enfant. Après quelques années, elle ressent le besoin d’un nouveau défi. Maîtrisant l‘allemand, l’anglais et le français, elle se lance aisément dans la profession de traductrice et propose ses services à une agence.
Puis, l’envie de s’essayer au journalisme se faisant ressentir, elle va tout d’abord occuper un poste de secrétaire de rédaction dans un magazine économique. C’est dans ce cadre qu’elle apprend qu’Edipresse organise un concours afin de donner leur chance à de futurs journalistes. Lors de ses études en lettres, elle a appris à bien « angler » un sujet et cette compétence fait la différence. Elle est alors sélectionnée et décroche un stage auprès de 24 heures et Femina. Il s’en suit une expérience de journaliste au sein de Général Média SA.
Tout au long de son parcours journalistique, elle sera amenée à effectuer des traductions d’allemand en français. C’est donc tout naturellement qu’il y a cinq ans, elle décide de se mettre à son compte comme traductrice et journaliste et qu'ensuite elle crée trois ans plus tard « La Page Bleue Sàrl ».
Sa fiabilité fait toute la différence !
Pour Sylvie Ulmann, une excellente réputation forgée sur sa fiabilité et un réseau de choix constituent les sésames de la traductrice. Ces qualités permettent clairement de fidéliser la clientèle.
Qu’elle traduise un article, un catalogue de mode ou un communiqué de presse, elle doit faire face à la même contrainte : rendre une traduction dont le nombre de signes s’intégrera dans la mise en page originale. Les textes allemands étant en moyenne 20% plus long que les français, cela exige d’elle un gros travail d’adaptation. « C’est devenu ma spécialité, » nous dit-elle.
Une traduction qui a l’allure d’un texte rédigé en français
Comme il est désagréable de lire un texte dont la structure et les tournures de phrase sont propres à la langue originale ! Pire encore : les pages internet traduites au moyen d’un traducteur automatique ! L’essentiel est de savoir se distancer du texte original tout en étant fiable, nous dit Sylvie Ulmann : « Si on me demande une traduction de 10'000 signes, je me dois de respecter la consigne à quelques signes près. Il est tout aussi important de donner à ma traduction le style d’un texte français. »
La traductrice doit en permanence se demander si ce qu’elle est en train d’écrire a du sens. Lorsqu’un passage est confus ou que l’auteur n’a pas bien cerné son sujet, elle ne doit pas hésiter à interroger ce dernier. Elle gagnera ainsi en crédibilité.
Le bouche à oreille
Sylvie Ulmann a principalement créé son réseau par le bouche à oreille dans le milieu du journalisme à partir de 2001. Occasionnellement, elle prospecte le marché par e-mail et propose ses services aux entreprises dont le site web est mal traduit, en les invitant à voir ce qu’elle fait sur son site internet et son blog. « Avoir un blog et être active sur mes réseaux permet de me faire connaître, » dit-elle. « A travers mon blog, on découvre mes centres d’intérêt, ma créativité et mes compétences technologiques. Ça me rend plus présente. »
En effet, suite à la consultation de son blog dédié à la décoration, plusieurs responsables de publication lui ont commandé des articles sur le sujet.
Faut-il se spécialiser ?
Cela dépend des affinités du traducteur. La règle d’or est de n’accepter que les traductions que l’on peut mener à bien. L’expertise de Sylvie Ulmann dans le milieu du journalisme, associée à une bonne connaissance générale, lui permet, entre autres, de traduire des articles de presse traitant de décoration, du monde entrepreneurial ou encore d’écologie. Par contre, elle ne traduirait pas de textes relatifs aux obligations de caisse. « En effet, les domaines bancaires, juridiques ou pharmaceutiques sont super spécialisés », dit-elle. « Il faut dès lors s’y connaître. »
Des outils de travail
Lorsqu’elle effectue ses traductions sur Word, notre passeuse de mot a recours tant au dictionnaire traditionnel qu’à des ressources en ligne. Il lui arrive aussi d’utiliser une base de données spécifique à un domaine, comme celle remise par un client sur les énergies renouvelables.
Environnement de travail et administration
Il importe à Sylvie Ulmann de séparer vie professionnelle et privée, raison pour laquelle elle partage des locaux situés au centre-ville de Lausanne avec d’autres entrepreneurs. Grâce à son comptable qui la décharge de la majeure partie des tâches administratives, et au logiciel de facturation FreshBooks, elle consacre en tout et pour tout une demi-heure à une heure par mois à son administration.
Le marché suisse
En Suisse, la demande en traduction est forte. De plus, un grand nombre d’entreprises helvétiques souhaite qu’il soit tenu compte des spécificités culturelles et langagières de notre pays. Nous devons toutefois faire face à la prospection active d’agences internationales, dont les tarifs concurrencent fortement ceux du marché indigène. La branche de la traduction risque dès lors d’être confrontée à un durcissement du marché du travail.
S’adapter aux nouvelles technologies
« La façon de s’informer est en pleine mutation et va encore se modifier dans les dix ans à venir. Il est par conséquent primordial de savoir utiliser les nouveaux outils de communication et les réseaux sociaux, » nous explique cette passionnée de l’information. Grâce à l’informatique, une traductrice a l’opportunité de travailler depuis n’importe quelle région de Suisse ou du monde.
Quel avenir pour la traduction en Suisse ?
De l’avis de Sylvie Ulmann, la qualité et la connaissance des spécificités helvétiques seront toujours recherchées et feront la différence. En outre, les traductrices et traducteurs maîtrisant leur art ne sont pas prêts d’être remplacés par un quelconque logiciel informatique. Enfin, de nouveaux secteurs d’activité émergent dans lesquels la traduction tient une place centrale. Il s’agit de veille technologique, scientifique ou juridique permettant de détecter les signaux révélateurs des changements importants dans ces secteurs et d’anticiper leur évolution. Les traductrices et traducteurs interviennent en amont du processus de traduction afin de rechercher et de sélectionner l’information pertinente. Ils peuvent ainsi conseiller les entrepreneurs et les aider à agir de façon ciblée tout en veillant sur leur image de marque.
Sylvie Ulmann sur le net :
Sa page web: www.lapagebleue.ch
Son blog: www.lapagedeco.wordpress.com
Newsletter Tradeuras – janvier 2015 – Le traducteur-veilleur