Une multitude d’étapes ont cours dans la conception d’un journal, bien avant que le lecteur ne l’achète dans son kiosque habituel ou ne le reçoive directement devant sa porte. Toutes ces actions impliquent un travail de nuit, dont le grand public n’a pas conscience la plupart du temps. De par leur nature peu visible, ces métiers qui font vivre les rédactions ne sont souvent pas reconnus à leur juste valeur. Rencontre et tour d’horizon avec David Haeberli, rédacteur en chef adjoint à la Tribune de Genève.
20 heures sur 24
Dans les bureaux de la Tribune de Genève, un vent de changement gagne la rédaction toutes les nuits aux alentours de 24h. En effet, c’est à ce moment que le journal papier est définitivement bouclé et qu’il part sous presse. Avant d’atteindre ce cap, les journalistes se sont mobilisés toute la journée afin de décider de la mise en page et du contenu éditorial, soutenus par l’équipe des correcteurs et des secrétaires de rédaction qui arrivent à 14h.
Du briefing de la rédaction à 9h15 jusqu’au bouclage de l’édition du jour, les rédacteurs en chef adjoints veillent également à ce que la ligne directrice et le format qui ont été convenus soient respectés, ils coordonnent le travail des rédactions et des secrétaires tout en suivant l’actualité au plus près, afin d’être à même de réagir rapidement et de modifier les articles en conséquence avant le bouclage. A partir du moment où les journalistes terminent leurs articles, ceux-ci doivent être relus par les chefs de rubrique, puis par les correcteurs avant la mise en page finale. A cet instant précis, la dernière phase de travail sur le journal papier prend forme, à savoir ce qui concerne les légendes, la correction, les titres ainsi que la mise en valeur du texte.
Il y a tout ce travail derrière. Quand on parle au grand public du journalisme, la plupart des gens n’en ont pas du tout conscience et ne pensent pas à toutes ces activités qui font vivre une rédaction. Pour le produit fini journal, tout ce travail-là est important.
Le journaliste papier dispose d’un espace défini qu’il a souvent tendance à vouloir dépasser dans son élan d’écriture. L’exercice d’édition et de relecture accompli par les secrétaires de rédaction prend ainsi tout son sens, relayant les journalistes dans les aspects techniques de l’article : couper, ajuster, mettre en forme… Selon l’actualité en cours, par exemple à la rubrique des sports, des membres de la rédaction sont toujours dépêchés sur le terrain pour couvrir les manifestations. Lorsqu’un journaliste rédige son article après une rencontre sportive à Bâle, il n’a plus qu’à l’envoyer directement à la secrétaire de rédaction qui le corrige et le met en forme le plus rapidement possible pour la publication dans l’édition du lendemain. Autre point important : la photo qui va faire la une. En règle générale, la une est la page qui peut être modifiée à tout instant avant le délai final. Celle-ci étant le prélude du journal, il est particulièrement important qu’elle soit pertinente et évocatrice, raison pour laquelle la photo est choisie avec soin en dernier.
Les journalistes se relaient pour assurer des veilles de nuit dans toutes les grandes rubriques : monde et économie par exemple. En ce qui concerne la rubrique monde, la couverture éditoriale est assurée la nuit par une journaliste externe à la rédaction basée à Boston. Ainsi, si un événement d’importance a lieu pendant la nuit, il peut être couvert directement sur le site web du journal depuis les Etats-Unis. La rédaction assure une couverture de 20 heures sur 24 actuellement.
L’importance du numérique dans le traitement de l’actualité aujourd’hui
Évoquer les sources d’information en ce début d’année 2015, c’est d’abord parler du traitement de l’actualité à chaud, c’est-à-dire dans l’instantanéité des événements qui secouent la planète. Le lecteur veut désormais être informé en temps réel et avoir le maximum d’éléments à disposition, afin de construire lui-même sa réflexion. Pour ce faire, toutes les grandes rédactions multiplient désormais les supports, afin d’avoir le spectre le plus large possible dans la couverture médiatique d’un événement. Au sein de la Tribune de Genève, après le bouclage du numéro papier et son envoi à l’imprimerie, le traitement nocturne de l’actualité se fait à travers le site web et l’application smartphone. La journaliste basée à Boston rend compte en temps réel et sur le web des faits importants, le plus souvent à partir d’une dépêche d’agence AFP ou Reuters, retravaillée pour la publication. Ainsi, il n’y a pas de pause de nuit pour ces éditions numériques et durant cet espace-temps, la page de garde du site est également mise à jour avec les principales nouvelles actualisées.
L’année est répartie en 52 semaines et la rubrique locale compte 20 journalistes. Partant de ce constat, la répartition des rotations nocturnes se fait directement entre les membres de l’équipe. Bien que celle-ci soit surtout le fruit des affinités particulières des journalistes pour le fait divers, la veille de nuit fait néanmoins partie intégrante du cahier des charges de tous les journalistes de la rédaction. La personne qui est de veille n’est pas physiquement présente à la rédaction, mais doit être joignable à tout moment. Pendant une semaine, en cas d’événement important, celui-ci se rend immédiatement sur les lieux, accompagné d’un photographe.
De l’importance de la rotation de nuit dans la rédaction
Dans la mythologie qui accompagne le métier de journaliste, les aspects techniques qui jouent un rôle très important dans la réalisation d’un journal ne sont pas toujours connus et valorisés par le grand public. De la personne qui corrige et apporte une nouvelle dimension au titre en passant par celle qui s’occupe de la relecture et du titrage des photos, les acteurs de cette chaîne analysent et synthétisent.
Le journaliste lambda trouve les bons titres géniaux, mais quand il s'agit de les faire. ce n'est pas si évident.
Les gens qui débutent dans le métier ne rêvent probablement pas d’exercer ces fonctions, néanmoins ce travail d’édition accompli en grande partie durant la nuit est crucial pour que le lecteur se réveille accompagné d’un journal de qualité.
Crédit photo : Laurent Guiraud/Tribune de Genève
Un article passionnant qui met en valeur le travail fourni par toute une réaction pour mettre en vente en général un journal de qualité qui traite de l'actualité nationale et internationale et cela 24h/24.
Sujet passionnant et bien traité que l'ai lu avec plaisir. On ne se rend pas toujours compte à la lecture de notre canard quotidien que seul l'engagement de chacun-e au sein de la rédaction permet le traitement de l'info 20h sur 24.
On vit une époque ou l'information se consomme comme du fast-food, le temps de l'analyse est révolu ?